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Bonjour à tous,
C’est la dernière édition avant la trêve automnale. On se retrouve donc le 7 novembre. Mais avant cela, je voulais accueillir les nouveaux abonnés : Laurent, Marion, Eric ou Camille et tous les autres, bienvenue à vous !
Passons au sujet de la semaine,
Alexandre
Comment Angela Merkel est-elle restée au pouvoir pendant plus de 16 ans ? Pourquoi Thatcher a-t-elle été si marquante dans les années quatre-vingt ? Comment Hannah Arendt nous a-t-elle invités à reconsidérer l'autorité ? En quoi Marie Curie a-t-elle impacté nos vies ? Pourquoi Louise Michel est-elle considérée comme l'incarnation de la Commune ? Et surtout, quel est l’ingrédient magique qui les réunit ?
Sommaire :
Angela Merkel : Gouverner sans fard
Margaret Thatcher : Redresser l’Angleterre
Hannah Arendt : Penser l’autorité
Marie Curie : Sauver des millions de vies
Louise Michel : Incarner la Commune
Angela Merkel : Gouverner sans fard
Le 9 juin 2018, Angela Merkel s’impose face à Donald Trump lors du sommet du G7. Trump est obstiné, tandis que Merkel reste ferme et cherche à obtenir un accord sur le communiqué final. Ce moment illustre son leadership en tant que principale figure européenne, alors que son style contraste avec celui d’autres dirigeants plus flamboyants.
Elle n'a jamais suivi les règles traditionnelles du leadership. Elle préférait être efficace et laisser les grands discours aux autres. En 2015, le Times l'a nommée "Chancelière du monde libre". Sa gestion pragmatique des grandes crises, telles que la crise financière de 2008, la crise grecque, le Brexit et la pandémie de Covid-19 l’ont aidé à durer tout comme son habileté à former des coalitions, y compris avec le SPD. Son approche est prudente et réaliste.
Mais au fond, sa réussite tient à sa capacité à refléter une personnalité en adéquation avec les attentes de ses électeurs. Au-delà de son manque d’éloquence, ce sont sa rigueur, son pragmatisme et son humilité qui ont conquis les Allemands. Ce n'est pas tant la vision qui importe, mais la personnalité de celui ou celle qui la porte, un principe qu'elle a totalement embrassé lors de ses mandats.
Margaret Thatcher : Redresser l’Angleterre
Margaret Thatcher ne s’avoue jamais vaincue.
Avant d’accéder au poste de Premier Ministre, Thatcher a développé ses convictions idéologiques fortes : opposée au communisme, favorable à l'Atlantisme et sceptique vis-à-vis de l'Europe. Hayek et Friedman sont les grandes inspirations qui vont l’aider à préparer méticuleusement ses réformes.
Mais on se souvient aussi de Thatcher pour ses formules percutantes comme "There is no alternative", slogans emblématiques de sa politique. Elles laisseront une marque durable sur la scène politique britannique et européenne. Sa revendication célèbre "I want my money back" lors des négociations européennes résume parfaitement son approche : ferme, sans compromis et prête à bousculer les conventions.
La guerre des Malouines en 1982 marque un tournant dans sa popularité, renforçant son image de leader inflexible. Malgré des réformes impopulaires, cette victoire militaire lui permet de consolider son pouvoir et d’être réélue triomphalement en 1983.
Si son bilan économique est discuté, son héritage idéologique perdure, influençant même des successeurs travaillistes comme Tony Blair et Gordon Brown. Au fond, c’est la meilleure preuve de l’impact profond de son action.
Version longue :
Hannah Arendt : Penser l’autorité
Hannah Arendt, philosophe juive allemande devenue américaine, a consacré sa vie à comprendre les grandes crises du XXe siècle, notamment le totalitarisme. Elle est connue pour son livre Les Origines du totalitarisme, et provoque la controverse avec Eichmann à Jérusalem, où elle explore la notion de la "banalité du mal". Arendt y décrit comment des individus ordinaires, comme Adolf Eichmann, ont participé à la Shoah non par cruauté innée, mais par manque de réflexion morale et soumission à l’autorité. Cette vision fit scandale.
Elle explore toujours la notion d’autorité dans La crise de la culture, où elle distingue cette dernière de la force et de la persuasion. Pour elle, l’autorité repose sur une hiérarchie acceptée, fondée sur un consentement mutuel entre dirigeants et subordonnés. Ce modèle est illustré par les sociétés antiques, notamment la Rome républicaine. L’autorité, loin d’être une forme de coercition, protège et renforce la stabilité d’une société en garantissant la légitimité de son ordre fondateur.
Lorsque l’autorité disparaît ou s'affaiblit rapidement, cela mène souvent à des révolutions violentes, comme l'ont illustré la Terreur ou la révolution bolchevique. Arendt met en lumière le fait que sans autorité, le désordre s'installe et met en péril la liberté individuelle.
Ironiquement, c'est donc l’autorité elle-même qui permet de sauvegarder la liberté, en assurant une coexistence pacifique et un ordre stable au sein de la société.
Version longue :
Marie Curie : Sauver des millions de vies
Le 11 novembre 1918, pendant que les habitants de Paris fêtent la fin des combats, Marie Curie se mêle à la foule. Originaire de Pologne et naturalisée française suite à son mariage, elle a décroché deux prix Nobel, un fait exceptionnel. Néanmoins, son implication durant la Première Guerre mondiale, moins médiatisée, est tout aussi impressionnante.
Dès 1914, devant le manque d'équipement radiologique pour soigner les soldats blessés, Marie Curie s'implique activement pour introduire la radiologie sur le champ de bataille. Avec le soutien de la Croix-Rouge et du ministère de la Guerre, elle approvisionne les hôpitaux en équipement et met en place des unités mobiles de radiologie, surnommées les "Petites Curies". Elle obtient même son permis de conduire pour piloter ces véhicules, ce qui permet de sauver de nombreuses vies grâce à des diagnostics rapides et précis.
Ainsi, entre 1914 et 1918, plus d’un million d’examens radiologiques sont réalisés, révolutionnant les soins médicaux et ralliant le corps médical à cette nouvelle technologie. En 1918, la France dispose de centaines de postes radiologiques, grâce à l’acharnement de Marie Curie.
Ce 11 novembre, en arrivant place de la Concorde avec sa voiture radiologique, elle sait qu’elle a contribué à une victoire, non seulement militaire, mais aussi scientifique et médicale.
Version longue :
Louise Michel : Incarner la Commune
C’est une figure, si ce n’est LA figure de la Commune.
Elle est impliquée dans plusieurs batailles, notamment la prise de l'Hôtel de Ville, la mutinerie des troupes versaillaises à Montmartre, ainsi que les combats à Clamart, Issy-les-Moulineaux et Neuilly. Lors de la répression sanglante de la Commune en mai 1871, qui entraîne la mort de plus de 20 000 insurgés, elle se rend pour sauver sa mère, mais est emprisonnée à Satory, où elle assiste aux exécutions de ses camarades.
Elle comparaît en 1871 pour ses actes révolutionnaires et son implication active dans l'insurrection contre le régime d'Adolphe Thiers. Anticipant une condamnation à mort, elle demande à subir son "lot de plomb", mais est finalement déportée en Nouvelle-Calédonie. Sur cette île, elle poursuit ses activités en tant qu'écrivaine, poétesse et militante, tout en approfondissant ses réflexions et ses engagements.
En 1888, à un meeting au Havre, elle échappe à une tentative d’assassinat, mais survit avec une balle logée dans la tête pour le reste de sa vie. Sa résistance face à la mort, que ce soit durant la Commune ou après, témoigne de son caractère intrépide. Louise Michel continue de défendre ses idées, que ce soit sur les champs de bataille ou à travers ses écrits, où elle trouve refuge et moyen d’expression.
Surnommée “La Vierge Rouge”, elle inspire Victor Hugo, avec qui elle échange régulièrement des lettres, et devient une figure emblématique du mouvement révolutionnaire. Elle poursuit son activité d'écriture même après son retour en France en 1880, où elle est accueillie en héroïne.
En 1905, Louise Michel meurt finalement des suites d'une pneumonie, marquant la fin d'une vie entièrement consacrée à la révolte et à la liberté.
Version longue :
Conclusion
Qu’y a-t-il de commun entre ces 5 personnages ? Entre la tempérance de Merkel, le jusqu’au-boutisme de Louise Michel, le goût de la provocation de Thatcher, l’intellectualisme d’Arendt ou l’inventivité de Curie ? Ce sont 5 destins différents dans des époques et des pays différents mais un trait de caractère les réunit tout de même : la ténacité.
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Alexandre