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J’ai eu l’excellente surprise la semaine dernière de voir apparaître sur X (Ex-Twitter) ce post de Nikos Aliagas 😃.
Passons maintenant au sujet du jour !
Alexandre
Qui n’a pas rêvé d’être une petite souris à l’Elysée ? D’écouter sans y être invité les conversations du président ? Et pour le curieux que je suis, de comprendre comment fonctionne concrètement celui qui exerce le pouvoir ?
C’est l’expérience que nous propose l’enregistrement de cette réunion téléphonique à l’Elysée.
Il s’agit d’un document exhumé des archives nationales, passé entre les mains de l’écrivain essayiste Patrick Samuel et du journaliste Benjamin Sire et que j’ai découvert via le compte X Gaullisme (Merci à eux pour cette découverte).
C’est un enregistrement rare et exceptionnel.
Je vous invite à l’écouter.
Je vais pour ma part redonner le contexte de cet enregistrement.
Nous sommes en février 1962. La grande affaire du Général de Gaulle depuis son arrivée au pouvoir est d’en finir avec la guerre d’Algérie après 7 ans de conflit. Par deux fois, des négociations secrètes entre le gouvernement français et les représentants du FLN (Front de Libération National) sont interrompues.
Afin de faire revenir les négociateurs algériens, De Gaulle fait planer l’idée d’une partition du territoire. Ainsi, il y aurait une partie française de l’Algérie et une autre algérienne. Il se sert pour cela du jeune Alain Peyrefitte, alors député. Ce dernier, missionné par De Gaulle et Pompidou, va décrire dans une série de tribunes dans le journal Le Monde ce scénario de géopolitique fiction.
L’objectif pour le gouvernement français est de faire monter en puissance la probabilité de ce scénario repoussoir pour les Algériens afin de précipiter l’ouverture de nouvelles négociations secrètes.
Alain Peyrefitte retranscrit dans C’était de Gaulle une discussion avec le Général qui va dans ce sens :
Il ne serait pas mauvais que le FLN se rende compte qu'on va forcément vers ça, s'il continue à fuir le contact. La solution négociée n'aboutira qu'à la condition que nous en ayons une autre toute prête. Il faut avoir deux fers au feu. Vous qui écrivez, pourquoi n'approfondiriez-vous pas cette solution dans des articles de journaux ? »
En me raccompagnant à la porte, il me dit simplement :
« Inutile de parler de notre entretien à quiconque.»
« Inutile »
C’est évidemment une litote pour : « Interdit.»
Ça marche et les négociateurs vont… Négocier.
Marchandages innombrables, discussions passionnées dans une ambiance de film policier. Les membres des services de sécurité français et algériens, côte à côte, en manches de chemise dans des pièces surchauffées, le pistolet sous l’aisselle ou à la ceinture, se relayaient pour observer par les fenêtres dont les vitres étaient couvertes de condensation, les abords du chalet.
Yves Courrière, La Guerre d’Algérie (1958-1962), Éditions Fayard
Ils se rassemblent à partir du 18 février 1962 dans la station des Rousses dans le Jura pendant plus d’une semaine afin d’écrire la base de ce que deviendront les accords d’Évian signés le 18 mars 1962 puis ratifiés par deux référendums.
Car l’objectif du Général est clair et il le rappelle dans la note qu’il dicte dans cet enregistrement : le Cessez-le-feu en Algérie et l’autodétermination.
Louis Joxe, ministre d’État des affaires algériennes, est présent sur place ainsi que Robert Buron, ministre des transports et Jean de Broglie. Ils rendent compte tous les jours par téléphone au Générale de Gaulle et à son premier ministre Michel Debré de la progression des négociations. C’est un de ces appels qui est capturé ici.
Pour terminer cette édition, je ne vais pas m’appesantir sur le fond, mais plutôt sur la forme que je trouve très intéressante.
De Gaulle est moins martial que je ne m’y attendais. Le terme de bienveillance friserait l’anachronisme, mais je ne perçois que très peu d’agacement ou d’impatience dans cette conversation malgré la pauvre qualité de l’appel. En tout cas aucune nervosité de sa part. Le ton devient presque amical (dans la limite de l’exercice) en toute fin de conversation.
“Dites bien des choses à Buron et Broglie”
On remarque aussi que c’est bien De Gaulle qui “anime” la réunion et s’occupe presque de la logistique. Il passe la parole, et formalise son déroulement et pose des questions afin de clarifier. Notamment au début lorsque la position des négociateurs n’est pas claire en cas de refus de l’accord. De Gaulle intervient pour amener Joxe à proposer une posture dans ce cas.
Enfin, comment ne pas esquisser un sourire lors du passage de la laborieuse dictée de la note que Joxe a pour mission de la sténographier ? Pas de chance, il y a des coupures.
Au fond, cet enregistrement, c’est la rencontre entre des questions cruciales et concrètes, le ton déclamatoire et pompeux de De Gaulle quand il veut affirmer une position et la trivialité d’une technique pas toujours au rendez-vous.
Qui n’a jamais vécu ça ?
Sources en plus de l’enregistrement original :
C’était de Gaulle, Alain Peyrefitte
Le podcast “Aux Rousses en 1962, les négociations secrètes franco-algériennes”
Quelques lectures à découvrir
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Alexandre
Le Général au bout du fil : l'enregistrement d'une réunion refait surface